(English version below)
ARTSUBS 2024 : entretien avec les commissaires Asmudjo J. Irianto et Nirwan Dewanto
Après plusieurs étapes de coordination, j’ai finalement pu entrer en contact avec les commissaires d’ARTSUBS 2024, Asmudjo J. Irianto et Nirwan Dewanto. Ensemble, ils ont préparé la première exposition d’art contemporain à grande échelle de la ville de Surabaya en Indonésie, où des œuvres allant de la peinture aux nouveaux médias sont présentées dans l’enceinte historique de Pos Bloc Surabaya, du 26 octobre au 24 novembre 2024. Avec un thème aussi vaste que « Ways of Dreaming », l’exposition promet une exploration des rêves, des identités et des commentaires sociaux dans l’art contemporain indonésien.
Au cours de notre entretien, ils ont fait part de leur espoir de voir ARTSUBS agir comme un catalyseur du dialogue artistique, de l’éducation culturelle et de l’engagement du public, tout en participant à la reconnaissance de la scène artistique contemporaine indonésienne en tant que partie intégrante de la vie quotidienne dans la société.
Note : Cet entretien a été édité pour ACA project, avec des réponses rassemblées en tant que contribution collective des commissaires d’ARTSUBS 2024.
ACA project : Qu’est-ce qui a inspiré le thème « Ways of Dreaming » pour ARTSUBS, et comment a-t-il vu le jour ?
ARTSUBS : Pour sa première édition, ARTSUBS a choisi le thème « Ways of Dreaming » (ndlr: qui pourrait se traduire en français par « Les voies du rêve »), qui illustre les diverses directions que prennent les rêves à mesure que l’Indonésie avance vers la modernité, comme un patchwork créatif tissé à partir d’innombrables histoires individuelles. Le thème « Ways of Dreaming » est né du désir de refléter la diversité des rêves et des aspirations qui façonnent le parcours de l’Indonésie et ses aspirations collectives au progrès. Chaque artiste interprète la notion de « rêve » dans son propre style et présente divers espoirs, critiques et réflexions imaginatives sur le passé, le présent et l’avenir de la société indonésienne. Ce thème vise à associer les valeurs indonésiennes de longue date aux ambitions futures, en faisant de l’art un catalyseur de la prise de conscience et de la réflexion sociales.
Avec plus de 154 artistes et plus de 200 œuvres d’art présentées, comment avez-vous sélectionné les artistes et les œuvres pour cette exposition ?
Notre approche de la sélection des artistes et des œuvres vise à dresser une « cartographie » de l’art contemporain qui représente la diversité du paysage artistique indonésien. L’objectif était de présenter un éventail équilibré d’artistes bien établis, d’artistes émergents, d’artistes sur le point d’être reconnus (émergents-établis) et de nouveaux venus sur la scène artistique. Ce mélange d’horizons permet une exposition plus vibrante et plus complexe qui encourage le dialogue entre les différentes disciplines artistiques et les différents médiums. Nous considérons que notre sélection est essentielle au développement de l’art contemporain indonésien dans des directions nouvelles.
Comment, à travers la variété des formes d’art présentées – des peintures et des installations aux nouveaux médias et aux sculptures – l’événement ARTSUBS vise-t-il à impliquer le public ?
ARTSUBS combine des méthodes utilisées par les musées, les biennales et les foires d’art. Nous nous engageons à faire d’ARTSUBS une véritable expérience en présentant des formes d’art qui trouvent un écho auprès de divers publics. Peintures, installations, nouveaux médias et sculptures ne sont qu’un début ; nous avons également créé des « plates-formes » spécifiques au sein de l’exposition. Des panneaux, des éclairages et des encadrements judicieusement placés feront ressortir le charme historique de Pos Bloc Surabaya et aident les visiteurs à réfléchir et à rêver devant les œuvres présentées.
Plusieurs de ces plates-formes présentent des œuvres spécialement commandées et constituent les points forts de l’exposition. Ces plateformes comprennent 1) les paysages contemporains, 2) la post-tradition et le post-orientalisme, 3) la matérialité et les innovations dans les supports, 4) les influences pop et lowbrow, 5) les objets et le concept d’objet, 6) le chevauchement de l’architecture et de l’art, 7) l’abstraction et ses extensions, 8) la spiritualité et les rituels, 9) les nouvelles personnalités, et 10) la photographie et les formes apparentées.
Comment voyez-vous la contribution d’ARTSUBS à la scène de l’art contemporain en Indonésie, et quel impact espérez-vous qu’elle aura sur la communauté ?
ARTSUBS représente et reflète l’art contemporain indonésien. Nous considérons Surabaya, avec sa riche histoire culturelle, comme un lieu idéal pour promouvoir l’appréciation et l’éducation à l’art. Au-delà de l’exposition d’œuvres, ARTSUBS vise à mettre le public en contact avec la créativité contemporaine, à susciter une plus grande implication culturelle et à enrichir les connaissances de la société. La diversité des formes artistiques, des médias et des expressions est un élément central. L’une des missions essentielles d’ARTSUBS est de démocratiser l’art contemporain et de le rendre accessible à un public plus large en intégrant une série de plateformes interactives, telles que des discussions, des ateliers et des visites de galeries. En concrétisant ces façons de rêver, ARTSUBS se veut être une exposition nationale au commissariat artistique pointu à Surabaya – c’est une partie de notre vision commune et ambitieuse.
Selon vous, quelles possibilités l’événement ARTSUBS offre-t-il aux artistes émergents de présenter leur travail aux côtés de noms plus établis ?
L’événement ARTSUBS est unique en ce sens qu’il rassemble à la fois de nouveaux talents et des personnalités établies au sein d’un même espace, ce qui constitue un dialogue intergénérationnel. En incluant des artistes émergents aux côtés de leurs homologues plus établis, nous espérons créer des opportunités de mentorat et d’exposition publique qui peuvent être révolutionnaires pour les artistes en devenir. Cette plateforme vise à créer une communauté, à cultiver la reconnaissance et à encourager l’essor de la prochaine génération d’artistes indonésiens.
Pourriez-vous nous faire part de défis ou de moments passionnants survenus au cours du processus de préparation d’ARTSUBS ?
En tant qu’enfant de la société, chaque artiste contribue à approfondir et à rafraîchir notre compréhension des réalités sociales. Pourtant, l’art contemporain indonésien, en tant que force sociétale, a encore besoin de soutien pour s’intégrer véritablement dans la vie de tous les jours. Le manque de lieux non commerciaux pour l’art dans les grandes villes, tels que les musées, témoigne de cette lacune. Tels sont les défis et ARTSUBS a pour objectif de contribuer à les relever. Surabaya, la deuxième ville d’Indonésie, n’a pas encore accueilli d’exposition artistique nationale majeure, malgré son riche potentiel pour créer des liens entre l’art contemporain et sa communauté. L’organisation d’ARTSUBS a été un parcours semé d’embûches logistiques et d’étapes gratifiantes. De la transformation de Pos Bloc Surabaya en espace d’exposition à la collaboration avec des artistes de toutes disciplines, chaque étape a renforcé notre engagement à créer un événement marquant et mémorable pour Surabaya.
Avez-vous des œuvres ou des artistes préférés exposés à ARTSUBS, et pourquoi ?
Nous ne choisissons pas de favoris, car nous adoptons une position non partisane. Toutefois, nous commandons des œuvres à des artistes qui, selon nous, méritent d’être mis en lumière, comme I Made Djirna, Anusapati et Handiwirman Saputra. Laissons les critiques, les collectionneurs et le public choisir eux-mêmes les meilleures œuvres de leur point de vue.
Comment voyez-vous l’avenir d’ARTSUBS dans les années à venir, et avez-vous des projets d’expansion ou de collaboration avec des artistes internationaux ?
Il est important d’être international, mais ce n’est pas encore notre objectif principal. ARTSUBS vise à s’établir comme un événement incontournable en Indonésie, mais nous aspirons à nous développer au-delà de Surabaya et à toucher un public international. Peut-être que la troisième année, nous essaierons de faire venir des artistes internationaux. Pour nous, il est plus important de renforcer l’appréciation et l’éducation du public, de contribuer à rendre l’art contemporain comme partie intégrante de la vie quotidienne indonésienne, laquelle n’a pas encore la culture des musées.
Entretien mené par Vattaya Zahra – Novembre 2024
ARTSUBS 2024: interview with curators Asmudjo J. Irianto and Nirwan Dewanto
After several rounds of coordination, I finally connected with the curatorial board behind ARTSUBS 2024— Asmudjo J. Irianto and Nirwan Dewanto. Together, they are setting the stage for Surabaya’s inaugural large-scale contemporary art exhibition, where art forms ranging from painting to new media are showcased within the historic walls of Pos Bloc Surabaya (Indonesia), from October 26 to November 24, 2024. With a theme as expansive as « Ways of Dreaming », the exhibition promised an exploration into the dreams, identities, and social commentaries in Indonesian contemporary art.
As we spoke, they shared their hopes for ARTSUBS to act as a catalyst for artistic dialogue, cultural education, and public engagement, all while sharing the effort to deepen appreciation for the Indonesian contemporary art scene as an integral part of everyday life in society.
Note: This interview has been edited for ACA project, with answers gathered as a collective contribution from the ARTSUBS 2024 curatorial board.
ACA project: What inspired the theme « Ways of Dreaming » for ARTSUBS, and how did this theme come about?
ARTSUBS: In its first year, ARTSUBS carries the theme « Ways of Dreaming », capturing the varied directions dreams take as Indonesia advances toward modernity—like a creative patchwork woven from countless individual stories. The theme « Ways of Dreaming » emerged from a desire to reflect the diverse dreams and aspirations that shape Indonesia’s journey forward and its collective aspirations toward progress. Each artist interprets ‘dreaming’ through their own style where they present diverse hopes, critiques, and imaginative reflections on Indonesian society’s past, present, and future. This theme seeks to embrace Indonesian long-standing values with future ambitions, positioning art as a catalyst for social awareness and reflection.
With over 154 artists and more than 200 artworks showcased, how did you go about selecting the artists and pieces for this exhibition?
Our approach to artists and artwork selection is aimed at curating a ‘map’ of contemporary art that represents Indonesia’s diverse artistic landscape. The goal was to feature a balanced range from those who are well-established to those rapidly emerging, and those on the cusp of gaining recognition (emerging-established), along with new arrivals to the scene. This mixture of backgrounds allows for a more vibrantly complex exhibition that encourages dialogue across different artistic disciplines and mediums. We consider our selection to be vital to the growth of Indonesian contemporary art in novel directions.
How does ARTSUBS aim to engage the audience through the variety of art forms presented, from paintings and installations to new media and sculptures?
ARTSUBS combines methods used by art museums, biennales, and art fairs. We’re committed to making ARTSUBS truly an experience by presenting art forms that resonate with diverse audiences. Paintings, installations, new media, and sculptures are just the start; we have also curated specific ‘platforms’ within the exhibition. Carefully placed panels, lighting, and framing, will bring out the historical charm of Pos Bloc Surabaya and help visitors reflect and dream alongside the work showcased.
Several of these platforms feature specially commissioned pieces and serve as primary highlights. The platforms include 1) contemporary landscapes, 2) post-tradition and post-orientalism, 3) materiality and innovations in medium, 4) pop and lowbrow influences, 5) objects and the concept of objecthood, 6) the overlap of architecture and art, 7) abstraction and its extensions, 8) spirituality and rituals, 9) new personalities, and 10) photography alongside related forms.
How do you see ARTSUBS contributing to the contemporary art scene in Indonesia, and what impact do you hope it will have on the community?
ARTSUBS represents and reflects Indonesian contemporary art. We see Surabaya, with its rich cultural history and background, as an ideal place to promote widespread art appreciation and education. More than displaying artworks, ARTSUBS aims to connect the public with contemporary creativity, inspiring greater cultural involvement and enriching societal knowledge. The diversity of artistic forms, media, and expressions will be a central feature. One of ARTSUBS’s core missions is to democratise contemporary art and make it accessible to a wider public by incorporating a range of interactive platforms, such as discussions, workshops, and gallery tours. Realising these ways of dreaming, ARTSUBS is envisioned as a thoughtfully curated national art exhibition in Surabaya—a part of our shared, ambitious vision.
What opportunities do you believe ARTSUBS creates for emerging artists to showcase their work alongside more established names?
ARTSUBS is unique in that it brings together both new talents and established figures within the same space, which is a cross-generational dialogue. By including emerging artists alongside their more established counterparts, we hope to create opportunities for mentorship and public exposure that can be groundbreaking for up-and-coming artists. This platform is meant to build community, cultivate appreciation, and inspire growth in the next generation of Indonesian artists.
Could you share any challenges or exciting moments during the preparation process for ARTSUBS?
As offspring of their society, each artist contributes to deepening and refreshing our grasp of social realities. Yet, Indonesian contemporary art, as a societal force, still requires support to truly become part of everyday life. The lack of non-commercial venues for art—such as dedicated art museums in major cities—shows this gap. These are the challenges and ARTSUBS aims to help bridge this. Surabaya, Indonesia’s second-largest city, has yet to host a major national art exhibition, despite its rich potential to create connections between contemporary art and its community. It has been a journey to organise ARTSUBS with both logistical challenges and rewarding milestones. From transforming Pos Bloc Surabaya into an exhibition space to collaborating with artists across disciplines, every step has reinforced our commitment to creating an impactful and memorable event for Surabaya.
Do you have any personal favourite pieces or artists featured in ARTSUBS, and why?
We do not pick favourites, as we take a non-partisan stance. However, we do commission works from artists whom we think deserve to be highlighted, such as I Made Djirna, Anusapati, and Handiwirman Saputra. Let the critics, collectors, and the public themselves choose the best works from their perspectives.
How do you see the future of ARTSUBS in the coming years, and are there any plans for expansion or collaboration with international artists?
Being international is important, but it is not our main goal yet. While ARTSUBS aims to establish itself as a staple event in Indonesia, we aspire to grow beyond Surabaya and reach an international audience. Maybe in the third year, we will try to bring in international artists. For us, it is more important to strengthen public appreciation and education, to bring contemporary art closer to an integral part of everyday Indonesian life, which still doesn’t have a strong culture of going to museums.
Interview by Vattaya Zahra – November 2024
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